Il y a quelques jours je participais à un "café théologique". A lui seul, le thème était tout un programme :
« Les laïcs chrétiens ont-ils voix au chapitre »
Assemblée respectable, composée en grande majorité de retraités (professeurs d’université, anciens médecins, etc..). Tous catholiques-romains, bien sûr, qui établissaient un bilan sur la place du laïc dans l'Eglise. Chacun, sans aucun doute, avait beaucoup d’expérience.
J’étais silencieux comme il se doit: puisque d’une autre confession, je n’avais pas le vécu de tant de chrétiens qui souffrent toujours aujourd’hui. En moi-même, je constatais : "pauvres gens, comme ils souffrent de ne pas être compris, cherchant des solutions qui ne semblent pas venir".
En effet, je me suis laissé dire qu’un professeur de théologie avait affirmé qu’il se trouvent trois ordres dans l’Eglise : les évêques, les prêtres et les diacres. Ils constituaient le corps des « serviteurs » du peuple chrétien, c’est à-dire les laïcs, quelle que soit leur formation.
Ceux-ci, bien que certains pouvaient être formés, étaient loin d’être considérés (et les exemples ne manquaient pas). Ainsi par exemple, seuls les prêtres et les diacres peuvent prêcher; un laïc, lui, ne peut entreprendre qu’un commentaire. Comme on disait lorsque j’étais enfant, les simples chrétiens ne comptent que pour du beurre... Cela renforce évidemment l'animosité anticléricale, car on trouve chez beaucoup de clercs une espèce de supériorité, continuellement blessante. Bien sûr, on pourrait refaire de l’histoire, du temps où dans l’Eglise il fallait être clerc pour être écouté. « Qui a le savoir a le pouvoir » !
Les laïcs chargés des tâches matérielles devaient rester dociles à leurs pasteurs…Voilà pourquoi les vocations ne manquaient pas…Chassez le naturel, il revient au galop ! Voilà pourquoi tant de gens rêvent encore d’être prêtres pour avoir un « pouvoir ».Si déjà des déchirures se constatent dans cette vision du monde, il y a cependant « un retour des certitudes » car beaucoup de jeunes prêtres cherchent à récupérer ce qui semblait perdu : « le pouvoir ». On le constate dans beaucoup de paroisses dirigées par de jeunes prêtres en col romain qui veulent faire « nouvelle vague ».. C’est toujours monsieur le curé qui doit avoir le dernier mot.
Dans mon Eglise (les épiscopaliens).Il y a un petit catéchisme dans le livre de la Prière Commune, (Book of Common, Prayer), j’y lis : « Qui sont les ministres de l’Eglise ? » Il est répondu : « Les ministres del’Eglise sont les laïcs, les évêques, les prêtres et les diacres » et un peu plus haut, il est dit :
Par qui l’Eglise accomplit-elle sa mission? L’Eglise accomplit sa mission par le ministère de tous ses membres ».
Voilà donc qui est clair et je sais que je suis prêtre par mon baptême, « prêtre, prophète et roi »… Il n’y a pas fondamentalement de séparation entre tous les baptisés, et ces distinctions qui ne sont pas si vieilles mais qui relèvent d’une conception pyramidale de la société, cherchent à dévaloriser le travail d’un laïcat que faute de mieux on doit incorporer dans la vie pastorale. Les « serviteurs de communauté » ou quelque autre idée du jour ne peuvent recevoir que des « ministères institués » à temps bien entendu.
Casse-cou
Ils restent sous la dépendance étroite de leurs curés et on sait bien que bon nombre de laïc ayant acquis des diplômes universitaires de théologie, doivent d’abord se soumettre aux diktats de leur curé. Au cours de ce débat j’ai ressenti une exaspération continuelle chez beaucoup de laïcs chrétiens, généreux et compétents, qui ne demandent qu’à servir. Certains prêtres, même lorsque la discussion devient aigue, déclarent qu’ils ont reçu mandat de trancher et que même si la bonne logique dit qu’ils ont tort, ils ont quand même raison de par leur ordination.
Lorsque je vois cela, je crie « casse-cou ». L’autorité telle qu’elle était vécue il n’y a pas si longtemps doit être totalement revue et la théologie dont elle dépendait doit être changée…Bien des réformes ont été accomplies depuis cinquante ans mais la place des laïcs dans l’Eglise telle que nos frères de la Réforme ont su la comprendre doit désormais se vivre…Ce sera un grand pas de plus vers l’œcuménisme.
Père Bernard Vignot
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