Lorenzo Dessi - sociologie du musicien

 

1- Peux-tu nous donner ton âge, ta formation, tes passions générales?


J'ai 34 ans. J'ai tout d'abord fait une formation en LEA Anglais-Espagnol, n'ayant pas grande idée de ce qui me plaisait vraiment. Issu d'un Bac L, ce premier choix d'orientation était peut-être une fuite en avant, car bien qu'ayant toujours eu une attirance certaine pour les mots de toute assonance, je ne m'étais à vrai dire pas projeté une seule fois dans ma vie active. Je me suis laissé un sursis, en quelque sorte. J'ai fait sur le parvis de la fac entre deux cours que je séchais ou pas, des rencontres étonnantes de personnes qui me ressemblaient beaucoup, et qui quant à eux étaient en filière Communication. J'ai commencé à pas mal les fréquenter si bien, que parfois je passais mes heures de LEA à lustrer les bancs de l'amphithéâtre avec mon jean's en cours de Sociologie ou de Sémiologie. Il m'a fallu très peu de temps pour réaliser que c'est cette voie qui me correspondait, tant elle était riche ; elle brassait des disciplines qui nourrissaient ma curiosité. Les langues n'étaient qu'une facilité pour moi, une seconde nature, mais je n'ai pas grand mérite, car je les dois sans doute à l'héritage de ma double nationalité franco-italienne. Quand on a la chance d'entendre parler deux langues dans son habitus lorsqu'on est marmot, l'esprit se forge, aussi paradoxalement que cela puisse paraître, dans la souplesse. Après, les rencontres avec les gens de la Com, j'ai rencontré un métier: «Concepteur-Rédacteur» (Le taf de Jean Dujardin dans 99 Francs). Quel coup de foudre que celui-ci.... J'ai quitté ma fac de langues après la Licence, pour faire une école de pub, persuadé que des mots et des idées pouvaient naître mon épanouissement. J'ai ensuite écoulé les plus belles de mes années d'étude, entouré de gens qui me ressemblaient encore plus, fait quelques stages de Concepteur-Rédacteur, puis pris par l'envie de faire mes armes dans le monde du travail et la nécessité de m'émanciper, suis devenu commercial. J'ai longtemps regretté de ne pas être devenu Concepteur-Rédacteur et ai fini par faire mon book. Avec un de mes meilleurs potes, avec qui la création à tous niveaux envoie du lourd, en général. Satisfait, je postule de façon spontanée chez toutes les agences qui me plaisaient sans trouver de réponse. Et puis, les années aidant, j'ai eu une prise de conscience terrible. Je me suis  rendu compte que la pub  n'est que le bras armé de slogans du consumérisme abêtissant, que tout le monde, moi-même y compris la subissait, qu'elle était en train de devenir plate et nuisible, intrusive, médiocre, et presque tout sauf un art ni une philosophie.
Pas facile de percer le cercle très fermé des agences de communication sans l'ombre d'un carnet d'adresse... Je me suis donc ré-orienté vers ce qui me semblait le plus en adéquation avec mes années passées en tant que commercial, et ce qui avait le vent en poupe... A savoir le E-business! J'ai donc repris mes études à 31 ans, chose qui n'a pas été facile, puis pris sur ma lancée ai entamé une formation en Chefferie de Projet digital. Qui dit E-business dit business, et donc consumérisme... Certes. Mais n'avons-nous pas tous besoin de consommer un minimum pour vivre? Je reste juste fâché que la pub soit devenue minable. Je pèse et mesure mes mots.

 

 

Clip "Je t'aime bien":

https://www.youtube.com/watch?v=HiEOhni2ZHE

 

 

Mes passions quant à elles tournent autour de l'Art, de façon globale. Je trouve que c'est certainement ce qui nous permet à tous de vibrer, de ressentir, de voyager. J'aime la littérature, le cinéma français, les belles toiles et les sculptures qui ne laissent pas de marbre. Je me rends souvent compte que je ne profite sans doute pas assez de Paris alors que j'aimerais pouvoir flâner plus souvent dans des musées. Bien sûr, j'englobe aussi la musique dans les arts que j'aime, et j'avoue ne pas être tout à fait en phase avec Gainsbourg, quand celui-ci qualifiait la musique d' «art mineur». Au contraire, la musique est pour moi quelque chose qui est tellement capable de transporter l'âme tout en étant pour autant invisible et impalpable, qu'on ne peut reconnaître que la musique a un aspect magique en soi. Côté musique, je peux avoir des goûts très éclectiques, et j'avoue avoir pu écouter un peu de tout. Néanmoins, c'est clairement vers le rock des années 90 que mon cœur penche le plus. Je pense qu'à l'époque, on avait globalement la chance d'être assez forts pour permettre aux ingés sons de faire un travail de toute beauté, et pas encore assez sophistiqués pour nous permettre de nous égarer de ce qui est vraiment bon, en en faisant un peu trop peut-être. Je préfère ne pas les citer car j'en oublierais sûrement, mais assez drôle de constater la déferlante de tubes à laquelle on a eu droit à la toute fin des années 90. La décennie commençait déjà très bien, mais la fin n'en a jamais été que plus belle. Un lien de corrélation avec l'approche de l'an 2000, peut-être... J'ai l'impression qu'à cette période, beaucoup de talents ont donné le maximum de leur substantifique moelle, comme pour marquer l'époque juste avant le changement de millénaire.

 

 

 

2 – Depuis quand es-tu dans la musique et l'écriture?

 


D'après mes souvenirs, j'ai eu mon premier cours de guitare à 17 ans. Le pote d'un pote qui d'ailleurs avait déjà initié notre ami commun. Ça faisait un moment que l'envie de m'y mettre me travaillait. Tout a commencé, je crois, un soir de vacances d'été quelques années plus tôt. J'étais alors en vacances du côté de Bordeaux, et un type dont je n'ai jamais pu voir le visage vivait à quelques maisons de là où j'étais. Tous les soirs, je l'entendais pousser la complainte et jouer des compos, je suppose, entre prouesse et simplicité. Je me suis endormi pendant deux semaine avec le son de sa voix, ses riffs assassins, et une certaine jalousie de ne pas être capable d'en faire autant. L'ami en question, lui, avait commencé beaucoup plus tôt et avait déjà un très bon niveau. Peu de temps après l'avoir rencontré, lui en était déjà au stade d'enregistrer les morceaux de son groupe et commençait à faire des concerts dans des salles de Paris, comme au Gibus par exemple. A l'époque, j'étais loin d'imaginer qu'un jour j'aurai la volonté de faire de cette passion naissante quelque chose d'un peu plus sérieux. Nous n'avons jamais fait ensemble qu'une session de cours, et tout ça me semblait bien délicat, comme à chaque fois qu'on entreprend un projet en partant d'une feuille vierge. C'est aussi la période où j'étais malgré tout capable assez facilement de ressentir des progrès presque palpables d'une fois sur l'autre où je prenais la guitare. J'ai démarré sur une vielle guitare acoustique on ne peut plus simple, achetée d'occasion par mon père dans un dépôt-vente. Ce fut d'ailleurs un grand moment, car à peine j'en ai eu la possession, j'ai eu le sentiment que quelque chose était en train de se passer dans ma vie. Je me rappelle encore des premières bouffées de satisfaction que je pouvais éprouver en plaquant quelques accords, et en sentant l'air tumultueux s'engouffrer entre mes doigts à la vibration des cordes. C'était très chouette comme période : je ressentais pleinement la magie de cette passion, que j'avais toujours su deviner en moi, et que je commençais tout juste à concrétiser. Je suis arrivé à la fac justement à peu près à cette période-là. Un autre ami de TD est venu chez moi alors un soir, et j'ai eu droit à un 2ème cours : un morceau des Red Hot si je me rappelle bien. C'était idéal pour poursuivre : un morceau simple et impactant, qui m'a demandé de faire quelques efforts, à me dépasser, et qui restait cependant tout à fait à ma portée, pour pouvoir me faire plaisir rapidement. Conforté dans l'idée selon laquelle il fallait à tout prix que je persévère, j'arrive alors à motiver ma mère de me payer des cours avec un vrai prof. Ça n'a pas traîné et quelques semaines après, j'avais un prof officiel chez qui j'allais une fois par semaine, du côté de la Bastille. Quarantenaire, et féru de rock, le type sur qui je suis tombé était génial. Pédagogue et sympa, il semblait aimer les mêmes styles que moi, et c'est pendant les pauses café-clopes qu'on s'octroyait au milieu de nos sessions, et en dehors du savoir qu'il me transmettait, ce type aurait presque pu devenir un ami. Quelques mois après, une déception amoureuse le faisait quitter Paris pour le Sud. J'ai beaucoup hésité à poursuivre en prenant un autre prof, et puis, je me suis dit que j'aurais eu sans doute beaucoup de mal à tomber sur aussi bon que lui, alors j'ai continué en autodidacte. J'ai continué pendant bien 3 ans à prendre mon plaisir en ne faisant que des reprises. A chaque fois que j'avais un moment, je reprenais sur Internet les tablatures des derniers morceaux dont j'étais fan, ou même de grands classiques que j'avais toujours adorés, et que je souhaitais m'approprier. Et puis, au fur et à mesure, sans même que je le décide vraiment, l'envie de taquiner le manche pour en extirper des sons qui m'inspiraient, est venue d'elle-même. J'étais si content et «satisfait» de réussir à trouver des suites d'accords, parfois bien peu classiques, et des lignes de chant qui collaient bien avec, que j'ai commencé progressivement par arrêter de m'adonner principalement aux reprises pour ensuite ne plus faire que des compos. Peu à peu, je trouvais aussi du plaisir à penser à la structure d'un morceau, et à toute son architecture en quelque sorte. C'était à chaque fois pour moi un terrain vierge, sur lequel je me sentais la liberté de tout construire. En ce qui concerne l'écriture, j'ai dû faire au lycée quelques ateliers au CDI de mon bahut. J'avais la chance d'avoir beaucoup lu, étant gamin, donc l'exercice était sans doute plus facile pour moi que pour quelqu'un qui n'avait jamais trop eu de bouquins entre les mains. J'ai aimé ça, sans pour autant en être fan. D'autant qu'à cette période, j'avais totalement arrêté de lire. Quand je me suis retrouvé à la fac, j'avais pas mal de connaissances avec qui j'avais tissé des liens de mélomanes, et très souvent en parlant des morceaux qui étaient pour nous des monuments, nous aboutissions sur la conclusion selon laquelle ce qui faisait le succès d'un morceau tenait sans doute la moitié de son carton dans la musique en elle-même, et l'autre dans les paroles. Quand je me suis mis à écrire, j'ai sans cesse pensé à ça. Je pense qu'il y a débat sur le sujet, et que la plupart des tubes qui ont souvent fait danser la plèbe semblent ne pas toujours avoir fait l'objet de beaucoup d'efforts sur ce plan-là, peut-être jugé alors secondaires, mais ma volonté a toujours été de m'appliquer à la tâche. Avant de me lancer dans une démarche de groupe proprement, j'ai utilisé le nom de «Roman Cassé», pour la partie empruntée à une écriture qui se voulait soignée. Ce nom ne me correspondait vraiment qu'à moi quand ce nom d'artiste solo finalement a dû être représentatif dans l'idée, la consonance, et l'esprit du groupe. Nous avons alors changé ça. J'aime beaucoup les chansons à texte dans lesquelles chaque syllabe semble avoir été sous-pesée avant d'être couchée sur le papier, et paradoxalement, je dois avouer que je peux aussi jalouser les auteurs qui ont cette propension naturelle à tout «flanquer» brut de décoffrage dans leurs paroles. Ça semble souvent un peu brouillon, mais lorsqu'il y a des tripes derrière, qui ont vomi tout ce qu'elles avaient dans le bide, sans sens du détail aucun ni grande recherche de style, l'effet peut être bluffant. L'authenticité, je pense... Il y a des textes que j'aime beaucoup de certains artistes, et qui semblent avoir été pensés, écrits et chantés à la même seconde, le tout d'un coup d'un seul, dès le premier jet,  sans interruption aucune ni la moindre rature. Qu'est-ce que ces textes peuvent être bons aussi... J'aime cette forme d'écriture « animale». Je ressens ça essentiellement chez certains groupes, même Anglais ou Américains, notamment. Si je ressens quelque chose de «vrai» dans ce qui a jailli, parce que peut-être que ça devait urgemment sortir justement, comme ça et pas autrement, je ne peux m'empêcher d'être admiratif, de l'artiste qui a su sortir de sa caboche influencée les choses simplement, et sans se préoccuper de savoir grand-chose. On peut «faire du sale» proprement, en somme. Pour «Je t'aime bien», je dois dire que ce n'est pas forcément de cette chanson que je suis le plus fier en ce qui concerne les paroles. J'étais un peu dans cet état d'esprit à ce moment-là à vrai dire, pour l'écriture, à tout laisser couler et partir comme ça venait. Dans cet esprit, je pense que je ne me suis peut-être pas encore totalement trouvé. Picasso disait qu'il avait mis tout sa vie à se mettre à être capable de redessiner comme un enfant. Peut-être que les grands écrivains qui ont pu avoir tendance à torturer leur plume, mettent eux aussi toute leur vie à être capable de se remettre à écrire comme des enfants. Je ne saurais trop dire à vrai dire, car je n'ai jamais été grand dessinateur ni grand écrivain, et suis encore bien vert, mais toujours est-il que je peux et sais apprécier aussi ces textes qui semblent n'avoir fait l'objet d'aucun travail particulier, si ce n'est celui d'avoir su rester spontané.

 

3 –Quels sont tes combats? Pourquoi chantes-tu? Comment te positionnes-tu par rapport à la société qui t'entoure?


Je n'ai aucun combat particulier avec la musique. Ou je ne souhaite pas forcément pour le moment faire de la musique, un vecteur de choix pour transmettre mes idées, ou encore ce qui me chiffonne. Certains artistes y arrivent très bien, et excellent même dans ce registre. Parfois trop, au risque de tomber dans le cliché, même. Je chante de façon purement égoïste, à la base, je pense. A l'origine, chanter, hurler, beugler, ont plus été un exutoire pour moi. Quelque chose de «vrai» qui devait sortir, et qui m'offrait le loisir de pouvoir m’époumoner à m'en décoller la plèvre pour «ex-merder mes amertumes» en quelque sorte. En dehors du plaisir de pouvoir brailler un bon coup, voire en y étant même invité, je reconnais que le plaisir de l'effort de la plume m'a aussi permis de le luxe de m'essayer à la tâche tout en la mélangeant avec la musique, justement. J'ai des combats qui me tiennent à cœur, comme tout un chacun, et j'ai déjà essayé d'en faire quelque chose musicalement, sans pour autant réussir à aucun moment à en être satisfait. Avant Plaisance, mon style était en gestation. J'en ai accouché pour de bon lorsque le groupe a commencé à exister à proprement parler.  J'ai mis des années à me chercher, avant de réussir à mettre le doigt sur mon style, et sur le nôtre. Il n'est pas exclu que je m'efforce par la suite de travailler pour faire quelque chose en ce sens, et il est possible que j'aime ça. Pour l'instant, les sujets qui me touchent et ce dont je peux parler, ce que je peux évoquer dans mes textes, relèvent plus de moments vécus, de ces petits riens qui font ces grands touts que j'ai su repérer au détour de mes journées, de ce qui m'a ému. J'aime observer, ressentir, retranscrire, vivre au final. Quand je commence une chanson, je n'ai bien souvent aucune idée de là où je souhaite déboucher. Le tout se construit au fil de l'eau assez vite. Mais l'impulsion première a presque toujours été un «besoin» personnel plus qu'autre chose, au démarrage. Mes chansons suivent parfois ma biographie, donc c'est sûrement assez auto-centré, mais pour l'instant, je n'ai à vrai à dire ni l'envie, ni le talent de faire autrement. Le groupe existe depuis un moment maintenant, et nous avons parfois connu de grandes pauses, pendant lesquelles je ne peux pas dire avoir été très productif. Quand l'émulsion est là, j'aime terriblement ce moment où je sens qu'il faut vraiment à tout prix que je m'isole et que passe un peu de temps avec ma gratte folk (habitant à Paris, dur de faire autrement avec des voisins, qui ont le droit à un peu de quiétude) . Ces moments sont facilement reconnaissables chez moi, et j'adore vraiment que le désir de créer soit au RdV comme une «envie de pisser», presque. Je parlerais presque de soulagement une fois que c'est fait. Je chante avant tout pour me faire plaisir, donc. Besoin ou simple envie, j'avoue éprouver beaucoup de satisfaction quand je pense que tout a été fait, qu'il n'y a rien à rajouter, ni rien à retirer. Ce sentiment d'accomplissement n'a à mon sens pas de semblable. C'est tellement bon d'être parti d'un petit rien d'émotion, et de réussir à déboucher sur quelque chose d'abouti. Je ne suis pas encore papa, mais je devine que ce ressenti doit être assez proche, dans une moindre mesure bien sûr, de celui qui voit son bambin débarquer dans ce bas-monde, puis le regarde une seconde fois, arrivé à l'âge adulte. Les grandes pauses que nous avons connues avec le groupe, me permettent avec un œil que j'essaie d'avoir critique, de remarquer certains légers tournants pris, ou surtout une certaine maturité. Il y a certains projets que nous pouvons ré-écouter après que pas mal d'eau ait coulé sous les ponts, et ils peuvent nous faire un peu sourire. Ça ne veut pas dire que nous n'en sommes pas contents, mais juste qu'ils sont le reflet d'une époque qui dans nos esprits est un peu révolue.

 

4 – Quels sont tes prochains projets artistiques?


Je travaille actuellement sur une chanson dont les textes sont achevés depuis bien longtemps. Le style de cette chanson (en français) est totalement représentatif de ce que nous faisons. Shuuuut... Je ne dirai pas un mot, et ne révélerai pas le titre tant que cela ne sera pas bouclé. Ça ne sera pas une grande surprise pour personne, puisque très fidèle de notre essence principale, mais ce morceau me tient beaucoup à cœur, car j'aime l'histoire qu'il raconte. Le plus dur a été fait à mon sens sur cette composition, mais il manque encore quelque chose... C'est sans doute ce processus de maturation qui me demande le plus d'efforts, quand tout ce qui venait à l'instinct a pu se concrétiser, et qu'il faut vraiment travailler pour soigner l'homogénéité du morceau, réviser la fluidité des enchaînements, et respecter l'identité de la chanson du début à la fin. Concernant les projets en cours, je peux aussi bien sûr parler d'un scène qui nous serait réservée pendant le Ramadan, à Casablanca. A vrai dire, l'invitation m'a été faite par une bonne amie de quand j'étais en école de pub, et qui depuis vit là-bas. La découverte du groupe semble lui avoir beaucoup plu, si bien qu'elle nous a tout de suite proposé de tout orchestrer pour mettre ça sur pieds. Bien sûr, cette invitation nous est allés droit au cœur, et nous l'avons prise avec beaucoup de sérieux. Sans doute, un peu pris de cours, nous ne serons pas prêts pour cette année. En revanche, l'invitation semble tout autant valable pour le prochain Ramadan de 2019. A l'origine, nous sommes un groupe qui s'est toujours principalement fait en studio. Chaque prise a été enregistrée par Brice (le bassiste de Plaisance) avec tout le talent d'ingénieur du son dont il sait faire preuve, piste par piste, avant de veiller à en ressortir le mix. Nous nous sommes toujours auto-produits et ne ressentons pas le besoin de passer à  autre chose pour le moment. Ce côté indépendant peut nous plaire aussi, après tout. Et nous ne sommes pas forcément prêts à faire des concessions sur ce que nous devrions faire, ce que nous devrions maquiller ou changer chez nous, de peur de nous travestir. Grâce aux lumières de Brice, qui est bien aguerri en la matière, nous avons le plaisir de tout pouvoir faire à notre sauce, et c'est un luxe dont nous ne voudrions nous priver pour rien au monde pour le moment. Une longue pause a été marquée chez nous, car le groupe était en train d'évoluer. Ce projet de scène pour Casablanca nous a redonné du cœur à l'ouvrage et nous sommes à présent trois à nouveau avec un certain Jean-Baptiste qui nous a rejoints à la batterie. Après tout, c'est dans des studios de répète au Luna Rossa ou au Studio Bleu que Plaisance s'est trouvé, à l'époque, mais il est vrai que le mode opératoire que nous avons toujours eu jusque là, et qui n'a pas privilégié la scène pour nous faire connaître mérite que nous nous re-penchions sur cet exercice. On répète, donc. Avec autant d'assiduité et de sérieux que nos vies bien remplies nous le permettent. Beaucoup de choses changent lorsqu'on est in situ avec un public en face de soi. Sans même en être déjà-là, il faut que nous bichonnions toute cette partie-là, avec la possibilité de rendre sur scène un rendu qui soit le plus fidèle que possible à ce que nos sons envoient à travers les baffles d'une sono. Je me rends compte, pour ma part, qu'il est temps que je sorte de ma zone de confort, et que j'appréhende la possibilité de faire ce genre de prestations. Pour être au top, il nous faudrait a minima un quatrième luron pour pendre une deuxième gratte, voir même une cinquième personne. A trois, le courant passe super bien déjà en tous cas, l'osmose est au RdV. Et puis, nous sommes tous les trois de bons potes qui s'entendent bien, ingrédient indispensable pour que l'osmose d'un groupe fonctionne autant que possible, à mon sens. Concernant, les projets en cours, j'ai aussi un vieille compo sous la main (en Anglais), dont on n'a jamais réussi à obtenir quoi que ce soit d'encore très probant, et que je souhaite absolument travailler avant de passer à autre chose en termes de création. Cette chanson elle aussi s'inscrit aussi totalement dans notre univers et donc pas bien surprenante en soi, mais elle fait partie de ces titres pour lesquels j'ai beaucoup d'amour. J'ai hâte que nous soyons prêts aussi sur celle-là aussi, en conditions de répète et que nous puissions en diffuser largement la dernière version.
Autrement, force est de comprendre qu'actuellement les enjeux qui font qu'un morceau qui cartonne ou pas, passent presque plus par l'image que par les enceintes de la FM. Nous sommes très contents de ce premier clip réalisé par Dare Pixel (Charles, un bon ami à moi, a tout réalisé du début à la fin), et avons la volonté de reprendre ce travail pour être présents sur les écrans. Nous avons sûrement un début d'identité visuelle, qu'il va falloir continuer à travailler, et à peaufiner. En tête de liste de nos envies, le morceau «Show Me a River», dont nous avons hâte de tourner le clip.         

 


5 – Quels sont tes modèles? Ceux qui inspirent ton univers?


Adolescent, et post-adolescent, j'ai beaucoup écouté de groupes Grunge. Nirvana reste bien sûr de toute évidence mon groupe culte. C'est par périodes, souvent, que je replonge un peu dans cet univers, essentiellement avec ce groupe. L'album 'Unplugged in New-York» est à mon sens e toute beauté, et je le pense, pour son style et son univers, à jamais indétrônable. Il y a toute une ambiance dans cet album, du début à la fin, que je peux encore l'écouter, sans m'en lasser, et presque à chaque fois avec un étonnement neuf à chaque fois, alors que j'en connais chacun de ses titres sur le bout des doigts. Chaque morceau est fidèle aux autres, tout en sachant être propre à soi, avec sa part d'originalité, son esprit, son âme. On rentre dans cet album comme dans un film ou un roman, qu'on a aimé découvrir dès la première fois, tout un monde dans lequel on se retrouve et dont on apprécie la féerie. Dans cet album, j'aime beaucoup cette part où l'électricité s'entremêle à des instruments totalement analogiques, comme avec le violoncelle. Le mariage des deux est délicieux et contribue à créer un territoire à part que nos oreilles ne connaissent pas encore suffisamment à mon goût. D'autres groupes se sont prêtés à l'exercice, bien sûr, et je raffole de ce genre de sons, mais le style reste encore à mon sens à creuser. L'album «Nevermind» reste aussi un chef d’œuvre, dans lequel il n'y a rien à jeter. J'ai beaucoup de mal aujourd'hui à trouver des albums de cette trempe-là, où l'acheteur en avait vraiment pour son argent. Dans un tout autre style, je peux coter l'lbum «Homework» des Daft Punks qui a été un vrai scandale à l'époque, et qui pour moi s'écoute intensément jusqu'à la dernière goutte. Mais on ne peut pas dire que cet album purement électro m'ait vraiment inspiré musicalement. Je le place juste très haut dans ce que certains artistes ont été capables de fournir comme qualité avec un niveau égal et constant. Il y a beaucoup d'autres groupes que j'ai beaucoup écouté aussi, comme Silverchair, Bush, K's Choice, Soundgarden, Stereophonics, ou encore Radiohead. Pour les groupes français, j'ai beaucoup aimé Noir Désir, Louise Attaque, et même Blankass. J'ai été grandement fan de Saez aussi, pendant un temps. Un morceau comme «Jeune et con» restera dans son genre le meilleur que l'artiste ait pu faire, je pense. Bien que je lui souhaite de réussir encore à se surpasser, bien sûr. Après, son côté engagé, et qui lui est si propre peut plaire à certains, mais je ne me reconnais pas forcément dans tous ses combats, ou que je n'accroche pas spontanément assez au son en lui-même pour vraiment aimer tout ce que fait cet artiste. Tous les groupes que je viens de citer font partie des univers dans lesquels j'ai eu plaisir à plonger et dans lesquels je me suis retrouvé. Que je le veuille ou non, j'ai dû m'imprégner de ces univers pour en retenir la substantifique moelle et composer un peu de la même façon. Ces choses-là sont certainement plus ou moins inévitables et normales, je pense. Chez moi, je les ai plus vécues comme elles venaient, sans pour autant avoir décider de les provoquer. Après tout, ça reste très dur de créer quelque chose de neuf à proprement parler. Par comparaison, rapprochement, et plus ou moins d'extrapolations, je pense que chacun a été déjà été confronté à ce moment, où parlant de musique avec un ami qui a un trou de mémoire, le nom de l'artiste ou du groupe ne vient pas, et où on se retrouve à essayer de retrouver un nom, en se disant «Mais, tu sais... C'est un peu comme... Mais en plus vénère... Ou ça ressemble vachement à du..., mais en moins brut de décoffrage.» Comme dit plus haut, j'ai mis à pas mal de temps à trouver la quintessence de Plaisance avec le groupe. Nous n'avons pas la volonté, pour le moment, d'apporter quelque chose de flambant neuf au Rock.Notre propre pierre à l'édifice nous convient bien amplement. Après, nous sommes comme beaucoup d'artistes un peu à part, et un peu comme les autres à la fois, je pense, avec notre identité pourtant bien affirmée, mais aussi notre lot de similitude et notre part de classicisme. Brice et Jean-Baptiste composent eux aussi avec ces parts de leurs inconscients où ils viennent, et bien malgré eux sans doute, puiser l'inspiration dans les morceaux qui ont été cultes de leurs vies. Évidemment, nous avons été tous les trois transportés par les mêmes groupes, et chacun a la chance de pouvoir faire découvrir aux autres des petites pépites que les autres ne connaissaient pas. C'est sans doute ça qui permet au groupe d'avoir une bonne cohésion, avec la part de chacun qui rebondit bien sur l'ensemble et correspond bien à celle des autres. Et puis, après tout, nous sommes avant tout une bande de joyeux lurons qui s'entend quand même très bien, et qui fait que ça marche, que c'est facile et limpide lorsque nous sommes en phase de création. D'après moi, c'est vraiment indispensable, car c'est ça aussi qui créé l'osmose, l'énergie et la bonne synergie d'un groupe, dans le fond.

 

 


 

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